dimanche 8 avril 2012

La rhétorique mène à tout (Bien vu, Figaro, lundi 9 avril 2012)

« C’est se départir de son rôle de citoyen que de voter ».Badaboum ! Voici comment Marc, « vingtenaire » poupin tout de gris vêtu, résume son anti-engagement au micro de France-Inter.fr Accroupi devant une table basse du Pantalon, bar intello-branchouille du quartier latin, Marc explique pourquoi il n’ira pas aux urnes. A rebours des institutions en place, il préfère accorder sa confiance aux systèmes associatifs. Ses petits camarades de table (même âge, mêmes pulls gris, même ton dégagé et timidement auto-satisfait) partagent les mêmes anti-convictions. « Je suis abstentionniste parce que le système est aberrant », confie l’un des convives, préférant élire directement un président du conseil et avoir un œil sur ses choix ministériels. Pour tous ces jeunes gens, l’acte politique n’est pas le fait d’aller voter, mais celui d’être inscrits sur les listes électorales. Lorsqu’on leur rappelle qu’il reste de nombreux pays au monde où des martyrs meurent pour le droit de vote, ils rétorquent benoîtement « ça fait partie de la démocratie que de refuser d’y participer ». La rhétorique mène à tout, on le voit. Les trois gommeux assument fort bien ce statut de pestiféré que leur accole les médias, aimant même jouer le rôle du « chevalier noir ». En attendant, nos chevaliers de bar-tabac ont des propositions de scrutins assez fantasques et joyeusement médiévales : « moi je propose le roulement ou le tirage au sort », dit l’un d’eux, la bouche en cœur. Son voisin, plus honnête, confie pour sa part : « je n’en sais rien, mais c’est une bonne base de pensée, non ? »

Vaut peut-être mieux qu’ils restent à la maison, en fait.


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