mercredi 7 novembre 2012
mercredi 24 octobre 2012
Critique des Fidélités dans L'Express (24 octobre 2012)
Nicolas d'Estienne d'Orves revisite l'Occupation
Par Baptiste Liger (L'Express), publié le
L'auteur réussit ici une fresque un peu chaotique mais richement documentée et feuilletonesque à souhait, où l'on croise Jean Marais, André Gide, Sacha Guitry, Darius Milhaud et l'écrivain collaborationniste Lucien Rebatet - dont Nicolas d'Estienne d'Orves, petit-neveu d'un célèbre résistant, n'est autre que l'ayant droit !
lundi 15 octobre 2012
samedi 13 octobre 2012
Compte-rendu des Fidélités successives sur le site "les livres que j'aime"
Les fidélités successives, Nicolas d'Estienne d'Orves, Albin Michel
J'ai adoré
: le rythme, le style, le ton, ce qui fait une super histoire que l'on a
plaisir à retrouver chaque soir avant de s'endormir. Il y a tout dans
ce roman, amour, haine, intrigues, anecdotes, humour, drames et larmes.
Les fidélités successives, Nicolas d'Estienne d'Orves, Albin Michel. 712 p 23,90€. En vente sur mon blog via Amazon.fr
Nicolas d'Estienne d'Orves, journaliste musical, a publié une vingtaine de romans dont Othon ou l'Aurore impossible Prix Roger Nimier 2002. Il a un talent de conteur étonnant.
Interview sur France Inter dans l'émission "Conduite accompagnée", en compagnie de GiedRe
Cliquez sur:
http://www.franceinter.fr/emission-conduite-accompagnee-mathias-deguelle-recoit-nicolas-d-estienne-d-orves-accompagne-de-giedr
vendredi 12 octobre 2012
Critique des Fidélités dans "Le soir" de Belgique (12 octobre 2012)
Infidélités, entre Modiano et Dumas
Le 13 mai 1946, Guillaume Berkeley
est condamné à mort pour collaboration.
Le public accueille le verdict
en injuriant le coupable. Une journaliste
conclut :
« L’île de Malderney est en
deuil, mais la France se porte déjà mieux :
un nouveau traître va payer pour ses crimes.
»
Malderney est une île anglo-normande
ajoutée aux cartes géographiques
par Nicolas d’Estienne d’Orves. Guillaume
Berkeley est un personnage tout aussi
imaginaire. Et que la France se porte
mieux est une appréciation personnelle
(de la journaliste, pas de l’auteur) dont
chacun fera ce qu’il voudra. De préférence
après avoir lu les sept cents et quelques pages
d’un roman touffu et passionnant.
L’argument rejoint celui que Patrick
Modiano a exploré dans certains romans
situés à la même époque : une ambiguïté
fondamentale cultivée en des temps troublés
après lesquels on vous demandera
dans quel camp vous vous trouviez – et, si
vous n’avez pas de réponse, on vous la
fournira. Nicolas d’Estienne d’Orves s’éloigne
de Modiano par la manière dont il
traite le sujet, plus proche d’un Alexandre
Dumas capable de tenir un lecteur en haleine
le temps nécessaire à aller jusqu’au
bout du roman sans relâchement de l’attention.
Au départ, il n’y a guère plus qu’une connerie
de jeunes adultes encore adolescents
dans leur approche de l’amour. Victor
et Guillaume, des frères élevés dans le
culte de la littérature française, se disputent
leur demi-soeur Pauline dont ils sont
amoureux, tandis qu’elle reste dans l’ambiguïté
(elle aussi). Guillaume part à Paris
au moment de la déclaration de guerre, le
1
er septembre 1939. Installé chez son mentor
qui séjournait chaque année sur l’île
de Malderney, Guillaume hésite bientôt
entre sa fidélité à celui-ci, qui est juif, et le
monde des plaisirs aussi intellectuels que
sensuels dans lequel sa jeunesse et sa vivacité
d’esprit font merveille. Il a dix-huit
ans, il est prêt à tout pour se frotter aux
esprits les plus brillants de son temps, et
tant pis s’ils l’entraînent dans une direction
que son absence de convictions ne
l’aurait pas fait choisir.
Il côtoie le « meilleur » de la collaboration
intellectuelle, dîne aux tables les plus
fines, fréquente les femmes les plus aguichantes…
Alexandre Dumas veille : on côtoie
des écrivains et des artistes de renom,
saisis dans des moments si peu reluisants
de leur biographie qu’on est parfois surpris
de les trouver là et, en outre, on a
droit à plus de rebondissements qu’on
n’osait en espérer.
PIERRE MAURY
mardi 9 octobre 2012
Compte-rendu des Fidélités sur le Blog "La librairie fantastique"
lundi 8 octobre 2012
Les fidélités successives, de Nicolas d'Estienne d'Orves
Je me suis embarquée dans la lecture d’un gros pavé intitulé Les fidélités successives, de Nicolas d’Estienne d’Orves, aux éditions Albin Michel. J’avais des à priori défavorables concernant cet auteur sans aucune raison valable, excepté qu’il écrivait avant des polars édités par Pocket. Qu’on s’entende, tous les polars édités par Pocket ne sont pas mauvais, loin de là, mais les couv’ n’était pas terribles, ni les résumés, et bon… voilà quoi, vous voyez je vous avais dit que c’était basé sur du vent.
M’enfin l’histoire des Fidélités successives, qui n’est pas
un polar, me faisait des clins d’œil langoureux, me balançant des Cocteau,
Picasso, Jean Marais et une histoire tragique de Seconde Guerre mondiale à la
figure. Et puis, sans aucune raison non plus autre que psychologique, je suis
irrémédiablement attirés par les gros pavés qui dans mon esprit sont toujours
gage de qualité.
Bon, ben sachez que ça n’a pas raté, j’étais plutôt contente
d’avoir pris la décision de le lire, parce que Les fidélités successive est un
très bon roman.
Pour vous raconter en quelques mots, Les fidélités
successives relate l’histoire de Guillaume Berckeley, artiste peintre,
journaliste, écrivain, jugé pour ses crimes pendant la seconde guerre mondiale,
sa collaboration avec l’Allemagne nazie, envoyé au bagne et suicidé
dans sa cellule en 1949.
Simon Bloch, vieil ami juif des Berckeley, celui qui a découvert
le talent de Guillaume dans son adolescence et lui a ouvert les portes de
Paris, revient à Malderney – l’île natale de son ami - pour lire à son frère
Victor et sa belle-sœur Pauline le manuscrit que le bagnard à laissé derrière
lui avant de se donner la mort.
Le reste du bouquin se présente donc sous forme de mémoires.
Loin de chercher à expliquer ses faits, à se justifier, à s’excuser, Guillaume
se contente de raconter les faits tels qu’il les a vécu, simplement, avec tous
les questionnements qui lui restent, et qui n’auront jamais de réponse.
Les fidélités successives ouvre alors deux intrigues, celle
de l’histoire du trio Victor /Pauline/Guillaume, qui a poussé Guillaume à
fuir Malderney, et celle de sa vie à Paris durant l’occupation allemande.
Ce qui m’a le plus intéressé dans ce roman c’est surtout le
côté historique du livre. On découvre la France et Paris avant la défaite, puis
pendant, et la vie que menait toute la clique des artistes français de l’époque.
Des fuites de mai 1940 à la résignation des parisiens occupés, jusqu’à la
collaboration passive de certains et la résistance cachées des autres… puis
enfin la libération, violente, rageuse, exterminatrice. Guillaume à tout vécu,
son parcours est atypique. Malderney étant une île (imaginaire) franco-normande
au même titre que Guernsey et Jernsey, il est anglais mais parle français dans
un pays en capitulation avec l’Allemagne et à présent en guerre contre les
anglais. Pour survivre, il se fait naturaliser, fraye avec ceux qui tirent le
mieux leur épingle du jeu, se met
sans vraiment le chercher dans les petits papiers de l’ambassade allemande et
se retrouve aux tables de Göring et de Céline. Photographié avec les plus
puissants occupants, il n’est pourtant pas un vrai collaborateur : il devient le
meilleur ami d’un juif homosexuel antisémite qu’il héberge dans le vieil
appartement de son ami en fuite Simon Bloch, trempe dans le marché noir pour
mettre du beurre dans les épinards, puis lorsque Pauline vient le retrouver et
lui demande de résister, il se lance dans le double jeu…
![]() |
Allemands sous l'occupation, qui se prennent un p'tit kawa. |
Un cheminement en demi-teinte, puisqu’il est à la fois
collaborateur et résistant, entraîné malgré lui dans les combines les plus
louches et les faits les plus héroïques. La particularité du parcours du
Guillaume est surtout qu’il ne cherche qu’à vivre. Sa passion est l’art, alors
il devient chroniqueur d’art dans un journal collaborateur. Son statut d’anglais
le désigne comme le nouvel ennemi à abattre alors il se fait naturaliser en
échange de service pour l'empire allemand… et il
fait tout ça de façon candide, naïve, sans arrière-pensée, sans être mauvais.
Il n’a rien contre les juifs, n’a rien contre les français, n’a rien contre les
allemands, n’a rien contre les anglais, il veut juste vivre à paris, continuer
de côtoyer les plus grands, manger aux tables de Jean Cocteau, Sacha Guitry, Jean
Marais, et oublier les dégradations intellectuelles que les plus grands penseurs
infligent à leur temps pour ne retenir que la beauté de Paris et son histoire
culturelle.
L’histoire du trio amoureux que forment Guillaume, Pauline
et Victor sert et dessert le livre à la fois. Pauline est la demi-sœur par
alliance des deux frères. New-Yorkaise, mais aussi de Malderney, elle les rejoint
à ses dix-huit ans, et se met à jouer avec les sentiments des deux frères. D’inséparables
ils vont vite devenir rivaux et une haine profonde va s’installer. C’est cette
rivalité qui va précipiter le départ de Guillaume pour Paris, pour oublier
Victor et Pauline. Bon bien-sûr l’histoire ne s’arrête pas là, c’est un poil
les feux de l’amour parfois dans tout ça… ! Mais cette romance permet de
donner un fil rouge à l’histoire, car finalement ce qui relie les trois
personnages est aussi ce qui va pousser Guillaume à sa perte.
Alors voilà, on est
plongé dans une ambiance parisienne des
plus étranges. Chaque table de restaurant, chaque banquette de cabaret
regorge
de collaborateurs ou d’allemands. L’aventure de Guillaume nous emmène
des les
festins et les soirées les plus pimpantes du Paris occupé, alors que le
reste de la population souffre et ne sait pas sur quel pied danser ; des
familles
de juifs se font rafler et la population se barricade derrière ses
volets
avec ses maigres tickets de rationnement, les rues sont désertes, le
couvre-feu
donne des sueurs à tous les promeneurs nocturnes, et les escouades
d’allemands
s’imposent dans chaque établissement en territoire conquis avec une
vulgarité et
un mépris de plus en plus flagrants. Guillaume lui se laisse porter,
nous
emporte avec lui, et on lit son récit emplis d'émerveillement et de
dégoût.
![]() |
Arrestation de Sacha Guitry en 1944, comme de nombreux artistes après la libération |
C’est le second livre que je lis sur cette période de l’histoire.
Le premier était Alibi Club, un polar historique qui se passe durant les deux
mois précédents l’arrivée des allemands à Paris, puis les quelques semaines
après leur intrusion. Son intrigue policière permettait de rencontrer tout un
tas de personnages aussi sombres et ambigus que ceux des Fidélités successives,
et des faits qui se sont passés dans l’ombre de l’histoire dont on n’avait
jamais entendu parler.
Ah, il est loin le
temps où l’on nous apprenait seulement la grande Résistance française,
passant la collaboration et la noirceur de l'occupation sous silence.
Aujourd’hui, les enfants commencent enfin à apprendre le
rôle de la France dans cette guerre, qui n’a pas été faite que de
résistance.
Tout n’était pas blanc, tout n’était pas noir, Les fidélités successives nous
fait voir l’histoire autrement, dans ce qu’elle a de plus beau et de plus
pourri.
Bref, je vous laisse aller jeter un coup d’œil à ce roman en
librairie, il a accompagné mes esprits pendant quelques jours après l’avoir lu,
comme si j’avais regardé le soleil un peu trop longtemps et que je n’arrivais pas
à me défaire de son empreinte, un gage de qualité selon moi.
dimanche 30 septembre 2012
critique des Fidélités sur le site de "Page"
Les Fidélités successives
Du fond du bagne de Clairvaux où il purge sa
peine pour trahison, Guillaume Berkeley résume ainsi son histoire,
celle du nouveau roman de Nicolas d’Estienne d’Orves : « les aventures
d’un Anglo-Normand débarqué à Paris tel Candide, et ayant plongé aussi
bien dans la collaboration que dans la Résistance ».
Par MARIE MICHAUD, Librairie Gibert Joseph, POITIERS
Nicolas d’Estienne d’Orves avait déjà fait de la Seconde Guerre
mondiale la toile de fond de deux de ses précédents romans, très
différents d’ailleurs : Fin de race (Flammarion, 2002) et Les Orphelins du mal (XO, 2007). C’est à nouveau le cas pour Les Fidélités successives,
mais avec une ampleur, un ton et une ambition tout à fait différents.
En effet, même s’il s’agit d’une grande fresque romanesque aux multiples
rebondissements, l’intérêt essentiel du propos tient aux questions que
pose la trajectoire du personnage principal, sur la passivité, la
trahison ou l’héroïsme.
Avant la guerre, Victor et Guillaume Berkeley, deux frères très différents mais très unis, coulent des jours paisibles sur l’île anglo-normande de Malderney, dont ils seront un jour les maîtres. Leur vie n’aurait pas grand-chose de romanesque s’ils ne tombaient amoureux de la même jeune fille, Pauline, ce qui les fait se déchirer et conduit le plus jeune, Guillaume, sur le continent. Simon Bloch, producteur de cinéma à succès qui l’accueille à Paris, lui sert de mentor et l’initie aux codes de la vie parisienne dans les milieux artistiques, intellectuels et bohèmes. Il fréquente Cocteau et Marais, mais aussi Picasso, Aragon ou Drieu La Rochelle. Cette période de griserie et de fêtes ne dure pas, car la guerre est déclarée et Simon, juif, doit s’exiler. Livré à lui-même, Guillaume déambule dans un Paris vidé de ses habitants puis occupé par les Allemands. Sa rencontre avec l’extravagant Marco Dupin – juif, antisémite, homosexuel et provocateur – lui ouvre les portes d’un Paris interlope à travers celles du cabaret Chez Dodo La Menteuse. Après une mission d’inventaire (et de pillage) des musées parisiens pour le compte d’Otto Abetz, Guillaume est engagé comme chroniqueur culturel à Je suis partout sous le « parrainage » de Lucien Rebatet. Pris dans un tourbillon de compromissions qui n’en sont pas toujours à ses yeux, Guillaume ne s’en extraira que sous l’influence de Pauline venue le rejoindre à Paris. Il se grise alors de jouer un double jeu, entre les apparences de la collaboration et des actions secrètes pour la Résistance. Mais qui connaît véritablement les règles de ce jeu dangereux ? Qui les fixe dans l’ombre ?
Même si l’on sait dès les premières pages quelle sera la chute du personnage, entre la trahison de ses rêves artistiques, de sa famille et de son pays, Les Fidélités successives est un roman-fleuve que l’on dévore avec plaisir et intérêt, car Nicolas d’Estienne d’Orves a su en faire à la fois une aventure passionnante, un tableau historique réussi et une réflexion sur le Bien et le Mal dans une période trouble de notre Histoire. Il met d’ailleurs le lecteur en garde contre un manichéisme anachronique à travers la voix de Guillaume : « Avec le recul du temps, tout paraît aisé et confortablement évident. Mais quand vous vivez l’Histoire au jour le jour, quand vous êtes plongé dedans, c’est beaucoup moins simple. On n’est pas spectateur, encore moins analyste ; on est acteur de son temps, qu’on le veuille ou non. »
Avant la guerre, Victor et Guillaume Berkeley, deux frères très différents mais très unis, coulent des jours paisibles sur l’île anglo-normande de Malderney, dont ils seront un jour les maîtres. Leur vie n’aurait pas grand-chose de romanesque s’ils ne tombaient amoureux de la même jeune fille, Pauline, ce qui les fait se déchirer et conduit le plus jeune, Guillaume, sur le continent. Simon Bloch, producteur de cinéma à succès qui l’accueille à Paris, lui sert de mentor et l’initie aux codes de la vie parisienne dans les milieux artistiques, intellectuels et bohèmes. Il fréquente Cocteau et Marais, mais aussi Picasso, Aragon ou Drieu La Rochelle. Cette période de griserie et de fêtes ne dure pas, car la guerre est déclarée et Simon, juif, doit s’exiler. Livré à lui-même, Guillaume déambule dans un Paris vidé de ses habitants puis occupé par les Allemands. Sa rencontre avec l’extravagant Marco Dupin – juif, antisémite, homosexuel et provocateur – lui ouvre les portes d’un Paris interlope à travers celles du cabaret Chez Dodo La Menteuse. Après une mission d’inventaire (et de pillage) des musées parisiens pour le compte d’Otto Abetz, Guillaume est engagé comme chroniqueur culturel à Je suis partout sous le « parrainage » de Lucien Rebatet. Pris dans un tourbillon de compromissions qui n’en sont pas toujours à ses yeux, Guillaume ne s’en extraira que sous l’influence de Pauline venue le rejoindre à Paris. Il se grise alors de jouer un double jeu, entre les apparences de la collaboration et des actions secrètes pour la Résistance. Mais qui connaît véritablement les règles de ce jeu dangereux ? Qui les fixe dans l’ombre ?
Même si l’on sait dès les premières pages quelle sera la chute du personnage, entre la trahison de ses rêves artistiques, de sa famille et de son pays, Les Fidélités successives est un roman-fleuve que l’on dévore avec plaisir et intérêt, car Nicolas d’Estienne d’Orves a su en faire à la fois une aventure passionnante, un tableau historique réussi et une réflexion sur le Bien et le Mal dans une période trouble de notre Histoire. Il met d’ailleurs le lecteur en garde contre un manichéisme anachronique à travers la voix de Guillaume : « Avec le recul du temps, tout paraît aisé et confortablement évident. Mais quand vous vivez l’Histoire au jour le jour, quand vous êtes plongé dedans, c’est beaucoup moins simple. On n’est pas spectateur, encore moins analyste ; on est acteur de son temps, qu’on le veuille ou non. »
Lu et conseillé par :
- Librairie Rive gauche à Lyon Catherine SAURIN
- Librairie Gibert Jeune à Paris Béatrice LEROUX
- Librairie Sauramps Odyssée à Montpellier Marion PINVIN
- Librairie Gibert Joseph à POITIERS Marie MICHAUD
- Librairie Ducher Plein ciel à Verdun Martine CLESSE
- Librairie Majuscule-Binet-Aubarbier à Sarlat-la-Canéda Jean-Luc AUBARBIER
- Médiathèque municipale à Mutzig Eric GIESSENHOFFER
Critique des Fidélités sur le site "critiques libres.com"
l'homme est duel... et la femme dualité
Fidélités successives.
« Avec le recul du temps, tout paraît aisé et confortablement évident. Mais quand vous vivez l’histoire au jour le jour, quand vous êtes plongé dedans, c’est beaucoup moins simple. » C’est ce que Nicolas d’Estienne d’Orvres tente de nous dire dans cette splendide fresque romancée de la France de la collaboration qui remue beaucoup de choses en nous. On y rencontre des artistes des écrivains qui nous ont charmés : de Cocteau à Picasso en passant par le troublant Brasillach qui fut finalement exécuté lors de l’épuration d’après-guerre malgré une pétition de cinquante écrivains signataires. « Le talent est un titre de responsabilité », faisant de ce talent une circonstance aggravante, car il accroît l'influence de l'écrivain, soutenait de Gaulle dans ses «Mémoires» en évoquant Robert Brasillach.
L’auteur s’est largement documenté sur le Paris occupé, les trafics et le marché noir, sur les collaborateurs, sur le personnage Otto Abetz qui le 8 juillet 1940, à la suite de l'armistice entre la France et l'Allemagne entra dans Paris et travailla à mettre en place la politique de collaboration. En effet, dès l'été 1940 la Liste Otto retire de la vente des ouvrages interdits par la censure allemande, organise l'expropriation des biens appartenant à des familles juives et fait main basse sur les prestigieuses collections d’œuvres d’art. Puis suivront les rafles odieuses du Veldiv’ et toutes les horreurs de l’occupation ou de la déportation. Le jour de la déclaration de guerre, un jeune anglo-normand, Guillaume Berkeley, conquérant naïf de la vie adulte, vient de débarquer à Paris chez Simon Bloch un ami de la famille pour découvrir la vie artistique parisienne et oublier une brouille mortelle avec son frère adoré suite à des ambiguïtés amoureuses avec leur demi-sœur, Pauline. On entre de plain pied dans la fiction car l’île en question ne fait que ressembler à Alderney, Sark ou Guernesey… elle est fictive et se prénomme Malderney. Malédiction? Et le voici, campé dans l’appartement parisien de son mentor, Simon Bloch qui a pris soudain la fuite comme tant de juifs, laissant derrière lui un patrimoine artistique considérable.
Très vite, Guillaume devient un familier d’Otto Abetz, écrit dans l’infâme « Je suis partout » et vit très confortablement. Il côtoie Lucien Rebatet, Céline, Sacha Guitry et une collection de grandes personnalités de l’époque. On sera happé par le récit de sa trajectoire chaotique, par l’honnêteté de ses engagements successifs, par ses doutes continuels. L’auteur se penche sur la vie de ce personnage avec l’intention de comprendre, non de juger pourquoi et comment un jeune-homme préservé par sa famille, destiné à être heureux a peu se jeter dans les maux du siècle.
D’un côté « les putes à boches, de l’autre les bonnes françaises…»? Non, tout ceci serait bien trop simple ! Le romancier campe des personnages et des situations complexes. Il a le don de susciter des renversements, de surprendre, de susciter chez le jeune Guillaume des engagements successifs en toute candeur et fidélité. Il nous raconte aussi une histoire d’amour palpitante et une guerre fratricide dans tous les sens du terme. « Racontez-moi votre vie, Guillaume Berkeley. Et aidez-moi à comprendre comment vous avez pu pousser toute ma famille dans les chambres à gaz…» Le roman, très documenté, très bien construit, est écrit avec talent, et oscille continuellement entre enfer et paradis, noir et blanc, entre collaboration et résistance? Entre histoire privée et guerre mondiale. Guillaume est sans cesse ballotté entre les deux amours de sa vie : Victor et Pauline. « Comme si comprendre était plus important que juger, comme si l’écoute était en définitive le seul remède contre la haine. »
Je parle des Fidélités Successives sur France Info, chez Philippe Vallet, dans "Le livre du jour".
cliquez sur:
http://www.franceinfo.fr/livre/le-livre-du-jour/les-fidelites-successives-de-nicolas-d-estienne-d-orves-749671-2012-09-26
dimanche 16 septembre 2012
Grande ballade en Australie (Les Echos Série Limitée, 14 septembre 2012)
En Australie, la beauté peut être asphyxiante, suffocante à force d'immensité. Comme s'il y avait un blasphème à la contempler, à se trouver en sa présence. La beauté australienne est également évidente, puisqu'elle vient des origines mêmes du monde. Mais il faut la chercher, la guigner.
Au vrai,
l'arrivée à Melbourne, dans le Victoria, surprend peu. On a beau être
aux antipodes, nous sommes en Occident. Ville bonhomme, ville joviale,
Melbourne est au croisement de Londres et de Boston, avec quelque chose
de délicieusement latin dans ses nombreux passages aux commerces de
bouche. Ici, les terrasses de café ont un petit air romain, un parfum de
dolce vita. Melbourne est une ville du bon et du bien vivre,
où les arts de l'esprit et de la table sont à la fête. Ici campent les
meilleurs restaurants du pays et les meilleurs théâtres. Fiers de leurs
régions, les habitants du Victoria veulent absolument que l'on contemple
leur immense Great Ocean Road. Serpentant le long de la côte sud du
pays, ce vertigineux parcours est une sorte de « super Etretat ». Tout
est démesuré : nos falaises normandes cheminent sur quelques dizaines de
kilomètres, les murailles australiennes, elles, semblent infinies. Et
ce n'est pas une mais vingt aiguilles creuses qui jaillissent du
Pacifique, ces surrections de roches étant baptisées les Douze Apôtres.
Pour
voir l'Australie authentique, l'Australie originelle, il faut faire cap
au nord et filer dans le fascinant Red Center. Dès la descente de
l'avion, à Alice Springs, on est saisi d'une bouffée de chaleur sèche.
Ici, tout est minéral. Parcourant les pistes de cet immense désert rouge
qui occupe une grande partie du continent australien, on se sent
étrangement jeune. Oui, tel est bien le sentiment qui s'installe devant
ces paysages infinis : on contemple l'aube des temps, l'aurore du monde.
Ces étendues ocre, hérissées de montagnes écarlates, sous un ciel bleu
cobalt. Ces eucalyptus, nés d'une terre plus sèche que le soleil
lui-même. Cette lumière écrasante, qui semble avoir éclairé les premiers
soupirs de l'homme. Nous sommes bien au paradis : un paradis rude,
austère, hostile, où l'on subsiste à la force de l'âme et grâce à
l'esprit de clan.
Bienvenue au pays des
Aborigènes ! Voilà soixante mille ans que ces hommes occupent ce
territoire. Soixante millénaires d'harmonie et de lutte avec les
éléments. Soixante millénaires passés en symbiose avec la terre-mère.
Les Aborigènes vivent sous le signe d'une mythologie commune, le dreamtime.
Sorte de temps primitif où prirent naissance tout à la fois leurs
traditions, leur géographie et leurs ancêtres, ils s'y immergent lors de
cérémonies occultes, comme on plonge un instant dans un monde
parallèle. Ces descendants de l'origine, on les croise dans les rues
d'Alice Springs ou bien au milieu du bush, lorsque, tout à coup, une
silhouette surgit étrangement en plein désert, à mille lieues de toute
habitation et de tout point d'eau.
Dormir
dans le bush est une expérience en soi. Il faut d'abord faire des
heures de pistes cahotantes, au milieu d'une nature sublime et désolée.
Puis trouver le bon spot : pas trop loin d'un point d'eau, pas trop près
des buissons, où se nichent des insectes qu'on n'ose nommer ici.
Ensuite, on « construit un feu » (anglicisme pour build a fire).
Alors, sous un ciel d'encre troué d'étoiles, on fait griller des filets
de kangourou aussi onctueux que du magret de canard. Si les guides sont
inspirés, ils vous racontent des légendes du bush, des mythes tirés du dreamtime,
puis vous mettent en garde contre les dingos, qui rôdent dans
l'obscurité. Enfin, les paupières s'alourdissent et l'on se glisse dans
un swag, sorte de lit-sarcophage posé à même le sable. Le
sommeil vous happe... Au lever du jour, lorsque le soleil frappe les
montagnes rouges jusqu'à l'incandescence, on croit vraiment assister à
la création du monde.
Après quatre jours dans l'outback,
retrouver la civilisation en découvrant Sydney est presque aussi
violent. Les neuf dixièmes de la population australienne vivent dans les
grandes villes, et Sydney est l'une des mégalopoles les plus excitantes
du globe. Si Melbourne est bostonienne et british, Sydney semble un
croisement de New York et San Francisco. De la première, elle a
l'arrogance massive, la grandeur marmoréenne de ses buildings, mais un
esprit californien flotte aussi dans les rues, avec ce permanent culte
du sport : chaque matin, la chaussée est envahie par les joggeurs. Et
puis, malgré sa minéralité très citadine, Sydney semble toujours
communier avec la nature. Les fabuleux jardins botaniques qui en
occupent le centre exhibent des arbres gigantesques, pour ne pas dire
cyclopéens. Enfin, il y a cet Opéra, symbole incontestable de la ville
(leur tour Eiffel), qui reste, un demi-siècle après sa construction, une
prouesse et une merveille. Coquille géante, collier de voiles, animal
étrange, le bâtiment s'avance sur la mer avec une audace placide et une
douce folie, résumant à eux seuls les paradoxes et les contrastes de cet
autre bout du monde.
Y ALLER
L'Australie,
c'est loin. Avec vingt-trois heures de vol, il n'existe pas de vols
directs depuis Paris. Vous passez nécessairement par Singapour ou
Hongkong afin de rallier Sydney avec la compagnie Qantas en A380 (à
partir de 1 295 euros en classe économique, www.qantas.fr,
tél. : 0 811 980 002). Sa classe Affaires est dotée d'un « Skybed »
conçu par le designer australien Marc Newson, proposant un lit de 2
mètres. Qantas vous conduira également à Alice Springs (2 h 30 de vol
depuis Sydney ou Melbourne). N'oubliez pas de prendre votre visa par
Internet quelques jours avant la date de départ (www.immi.gov.au). Consulter également les sites des offices du tourisme d'Australie (www.australia.com), du Victoria (www.visitmelbourne.com/fr) et du Territoire du Nord (www.tourismnt.com.au).
SE LOGER
À
Melbourne, on descend à l'hôtel Olsen (ci-dessus), au design
contemporain et aux chambres pourvues de toiles d'artistes (222 euros, www.artserieshotels.com.au/olsen).
Plus central et plus classique, l'hôtel Lindrum est une institution
melbournaise, avec son immeuble victorien et sa déco très new-yorkaise
(274 euros, www.hotellindrum.com.au).
À Alice Springs, le Lasseters Hotel Casino est un ample resort, doté de
plusieurs piscines, de deux restaurants et d'un casino. Les chambres y
sont spacieuses et très bien climatisées (100 euros, www.lhc.com.au).
La véritable expérience est une nuit passée dans l'outback, à la belle
étoile, avec la compagnie Wayoutback Desert Safaris (380 euros par
personne, www.wayoutback.com.au).
À Sydney, il est difficile de faire l'impasse sur une nuit au
Shangri-La, dont les chambres dominent la somptueuse baie et le fameux
Opéra (290 euros, www.shangri-la.com).
OÙ MANGER
À
Melbourne, allez dîner dans le délicieux Charcoal Lane. On y mangera du
tartare de wallaby, du filet de kangourou, du barramundi (un poisson),
du crumble de rhubarbe, arrosé d'un des merveilleux shiraz australien (www.charcoallane.com.au).
À Alice Springs, dégustez des nuggets de queue de crocodile (semblable à
du poulet) ou des brochettes de chameau (proche de l'agneau), arrosés
de (très bonne) bière australienne, au Juicy Rump, restaurant du
Lasseters Hotel. Brunchez à l'étonnant Kwerralye Café, qui propose des
petits déjeuners 100 % aborigènes, servis par le personnel idoine (www.kwerralyecafe.com). Si l'Asie vous démange, le restaurant Hanuman propose d'excellents plats d'influence thaïlandaise (www.hanuman.com.au). Plus roots, un dîner dans le bush, sous les étoiles, avec le chef Bob Taylor, ses bush tomatoes, traditional outback beef stew et autres wattle seed dukkah (www.rttoursaustralia.com.au,
120 euros par personne). À Sydney, si vous dormez au Shangri-La, allez
dîner au restaurant Altitude (photo en haut à droite), au 37e étage de
l'hôtel. La table est au diapason de la vue. Et la carte des vins
propose quelques (coûteuses) merveilles locales. Les amoureux de cuisine
aborigène achèteront à grand profit le livre Mark Olive's Outback Café. A Taste of Australia
(RM Williams Publishing) du chef Mark Olive, le Ducasse de la cuisine
aborigène. Certes, pas facile de trouver de l'émeu fumé en France, mais
qui ne tente rien n'a rien...
À VOIR
Mebourne
est une ville où l'on a envie de baguenauder, de terrasses en passages
couverts, avec un net parfum d'Europe. Les passionnés d'art iront
visiter la NGV (National Gallery of Victoria), qui fait la part belle à
l'art aborigène (www.ngv.vic.gov.au). Les disciples de Linné iront se perdre dans les Royal Botanic Gardens (www.rbg.vic.gov.au).
Enfin, les amateurs de vertige monteront au sommet de l'Eureka Skydeck,
plus haut gratte-ciel de la ville (300 mètres). À son sommet, une
cabine de verre pouvant contenir dix personnes se décroche de la façade
et vous plonge dans le vide pendant quelques minutes. Terrifiant ! (www.eurekaskydeck.com.au).
Alice Springs est le point de départ de toutes les grandes excursions
dans le centre de l'Australie. On y rejoint le mythique Ayers Rock ou le
Kings Canyon. On peut aussi aller visiter les superbes West MacDonnell
Ranges, chaîne de montagne entourant la ville. Si vous avez le courage
(et les autorisations), roulez jusqu'à Papunya, visiter le Papunya Tjupi
Centre (www.papunyatjupi.com),
lieu de naissance de l'art aborigène. Sinon, la ville d'Alice Spring
dispose d'une galerie exposant les Papunya Tula artists (www.papunyatula.com.au). Attention, ces deux institutions sont distinctes l'une de l'autre. Mais toutes deux vendent des toiles aborigènes.
À PARIS
Parfois
considéré comme une curiosité ethnologique, l'art aborigène fait enfin
son entrée en fanfare au Musée du quai Branly. L'exposition « Aux
sources de l'art aborigène. Papunya, Australie, 1971-1983 » va permettre
au public français de découvrir les oeuvres fondatrices de cette école
artistique. Les Parisiens vont contempler les toiles d'artistes aux noms
chantants et mystérieux, comme si la préhistoire s'invitait en bord de
Seine pour leur souffler au visage son éternelle jeunesse. Du 9 octobre
2012 au 20 janvier 2013, www.quaibranly.fr
NICOLAS D'ESTIENNE D'ORVES
samedi 15 septembre 2012
Je parle des Fidélités Successives chez Olivier Barrot, sur France 3, dans "Un livre, un jour"
cliquez sur: http://programmes.france3.fr/livres/un-livre-un-jour/les-fidelites-successives
jeudi 6 septembre 2012
Adorablissime papier de Yann Moix dans le Figaro Littéraire de ce matin
Un roman culotté
Nicolas d’Estienne d’Orves est fou. Quand il ne passe pas en contrebande
des petits opus maigres et discrets sur ce qu’il mange ou ce qu’il
écoute, qu’il n’écrit pas sur la mort de ses meilleurs amis, il nous
assène, avec un culot qui n’appartient qu’à sa manière et qu’il
accompagne généralement d’une andouillette, d’énormes romans remplis de
personnages réels qui n’ont jamais existé et réciproquement. Cette fois,
non content d’avoir fait le tour du nazisme (sujet thrillerisé d’un
précédent pavé), il vient nous gifler, ravi et repu, de 700 pages
d’aberration collaborationniste. Pour saisir le toupet du gars, et
surtout son état d’esprit, sa façon, son univers, il faut lire Les
Fidélités successives, saga démente et crépusculaire où l’on croise à
chaque couloir Rebatet et Brasillach, comme on regarde Si Versailles
m’était conté de Sacha Guitry. Cet improbable fourre-tout, agencé comme
une tour Eiffel, relève de l’Histoire burlesque ou du burlesque
historique. Mel Brooks n’est pas très loin non plus. Est-ce bien grave ?
Nenni : par l’accélération des chronologies, les feintes inéquitables,
les détours machiavéliques, les inacceptables insinuations, les
hypothèses furieuses, ce roman, dont le héros (Guillaume Berkeley) est
un collaborateur qui résiste et un résistant qui collabore, permet,
mieux que nombre de laïus universitaires et de pompeuses plaquettes,
d’appréhender, non l’exactitude d’une période, non son historicité,
peut-être pas non plus sa totale vérité, mais du moins sa complexité. La
vérité de sa complexité. Et la complexité de sa vérité. Si le burlesque
fonctionne, si la fiction décolle, si le roman roule, c’est parce que
le fond historique est là, fouillé, maniaque, précis, documenté. Le
décor est ciselé : toute scène peut dès lors s’y jeter, s’y dérouler. Et
le romancier, qui n’entend pas recevoir dans son souk la visite des
historiens décorés, peut secouer le réel dans tous les sens, ainsi que
dans un shaker. Nicolas d’Estienne d’Orves est semblable à un barman (du
Lutetia) concoctant pour d’improbables convives des potions qui ne sont
pas pour les enfants. La trame centrale du roman, ici, fera vaciller
les coeurs tendres et inquiétera les dogmatiques : qu’on puisse
expliquer comment des résistants en viennent à livrer des Juifs à
l’Allemagne pour financer leurs réseaux, résumé avec cette mienne
brutalité, est un choc qui n’est pas recevable ; mais quand le romancier
y injecte sa science, sa manie, sa manière, sa folie, sa danse, on
bascule dans un univers à devenir fou, paranoïaque, malade, tantôt fort
et tantôt vulnérable. Cette « chose » romanesque est un kaléidoscope qui
renvoie à l’infinie difficulté qu’avaient les véritables acteurs de
l’Histoire à se dépêtrer de cette toile d’araignée, de ces sables
mouvants, de ces labyrinthes qui constituaient alors la texture de la
réalité. J’ai toujours noté, non sans effroi, la violence de la
fascination éprouvée par mon cher d’Orves pour les virages extrêmes de
l’existence humaine ; son grand-oncle, figure éminente de la Résistance,
doit s’amuser des folies de son petit-neveu : il aimait le talent je
crois, et, je le sais de source sûre, n’était pas l’ennemi de la
démesure. Ni de l’ambition. Les Fidélités successives resterait, si
Nicolas d’Estienne d’Orves cessait d’écrire aujourd’hui, son meilleur
livre (celui de la « maturité »). Mais ce dingue absolu ne fait que
commencer. LES FIDÉLITÉS SUCCESSIVES De Nicolas d’Estienne d’Orves,
Albin Michel, 712 p., 23,90€.
mardi 4 septembre 2012
vendredi 31 août 2012
mercredi 29 août 2012
sur le site Marjolire, on est bien aimable avec "Les Fidélités"...
résumé
Genre : roman sur fond historique.
Epoque : 1938 à 1948.
Lieu : Ile de Malderley et Paris.
Nbre pages : 368
Résumé :
Guillaume Berkeley quitte à la suite d’une violente dispute avec son frère l’île de Malderney pour rejoindre ce Paris qu’il a tellement envie de découvrir. C’est la guerre, l’occupation, la collaboration avec l’ennemi.
Sur fond de guerre il nous raconte l’inconcevable, l’inacceptable avec une logique et une sincérité dérangeante. A 17 ans, il bascule bascule dans le monde adulte avec violence et innocence.
les passeurs de mots vous conseillent
En décrivant dans une fresque qui ne laisse aucun répit les tribulations du jeune Guillaume dans un Paris occupé, Nicolas d’Etienne d’Orves dévoile des pans entiers de la collaboration. Pour relater ces heures sombres de l’histoire de France le romancier met tout son art au service de ses personnages et d’une intrigue savamment maîtrisée. C’est ainsi que l’auteur invite dans son récit Sacha Guitry, Robert Brasillach, Raimu, Jean Marais, Gide, Picasso, Elsa Triolet, Aragon, Drieu La Rochelle…
Avec un art consommé il nous les présente au gré des évènements d’une vie parisienne qui s’accommode sans trop de difficulté de l’occupation. Le théâtre, le cabaret, les restaurants, les concerts, les fêtes privées, le cinéma affichent complet. Il est alors facile de se laisser prendre aux mirages de l’envie de paraître sans percevoir à quel point le double jeu comporte de nombreux risques
Sur fond de la Collaboration la plus noire, la plus veule, la plus engagée au service de l’occupant, Les fidélités successives brosse le portrait brillant d’un homme saisi par le vertige d’une histoire qui le dépasse et dont il ne retient que le confort qu’elle peut lui procurer.
Livre sur la guerre et ses compromissions, sur l’antisémitisme, sur l’engagement et la fidélité, c’est aussi sur un mode plutôt grave une histoire d’amour. Un amour qui sous-tend tout le livre, lui donne sa force, son énergie, sa rage.
Dominique M. – Les Passeurs de mots
J’ai aimé :
- Le fond historique riche en détail
- L’écriture des plus agréable à lire : on dévore ce petit bijou.
- Les personnages, même les plus répugnants : chacun reste dans son créneau historique … ou presque
- J’ai beaucoup aimé le regard du narrateur sur l’époque, le monde et les acteurs qui l’entourent.
Nadia, Les Passeurs de mots
Ce que j’ai aimé :
Les nombreux rebondissements et le coté haletant de ce roman.
La description de l’intérieur du « petit monde » du Paris collaborationniste (artistes, journalistes, malfrats…)
Le destin tragique d’un candide sans courage, au milieu d’un monde qui va le broyer
Serge, Les Passeurs de mots
J’ai aimé :
L’auteur raconte la vie de Guillaume sous l’occupation allemande dans un Paris où cohabitent civils et militaires allemands. On côtoie par les yeux de ce jeune homme influençable Goering, Hitler, des journalistes, des artistes qui ont composé avec le régime hitlérien et antisémite. Les choix de Guillaume nous mettent souvent mal à l’aise, sa personnalité est dérangeante : celle d’un jeune résistant sûr de ses choix et de ses combats aurait été préférable.
Marysette, les passeurs de mots
lundi 27 août 2012
Chronique des Fidélités successives sur le blog "Lou l'a lu".
lundi 27 août 2012
Les fidélités successives de Nicolas D'ESTIENNE D'ORVES
*****
L’auteur
nous livre le journal que Guillaume Berkeley aurait écrit avant de
mettre fin à ses jours. Il revient sur son parcours et tente de
comprendre comment ce jeune homme élevé à l’écart du monde a pu
s’approcher ainsi du nazisme.
Devenu
collaborateur presque malgré lui, il a touché à la résistance et mené
un véritable double jeu avant d’être trompé. Il suit les courants au gré
des amitiés, en tentant de ne pas décevoir et de garder la tête hors de
l’eau. « Comme si tu te réinventais chaque jour, au contact des
évènements, de l’histoire. Comme si tu étais forgé par notre époque.
Comme si tu étais, dans tes paradoxes et ta franchise, le plus pur
produit de cette guerre. »
Un
texte dense et profond qui nous plonge dans l’ambigüité d’un homme et
d’une époque où le hasard d’une rencontre, d’un choix, sont
déterminants. « Nous sommes ballotés par l’Histoire, et l’essentiel est de rester en vie. »
Je parle des Fidélités successives sur le site "la fringale littéraire"
cliquez donc sur:
http://www.lafringalelitteraire.fr/RENTREE-LITTERAIRE-2012-Nicolas-d-Estienne-d-Orves-propose-un-roman-ambitieux-l-une-des-pepites-de-cette-rentree-_a764.html
et vous saurez tout!
http://www.lafringalelitteraire.fr/RENTREE-LITTERAIRE-2012-Nicolas-d-Estienne-d-Orves-propose-un-roman-ambitieux-l-une-des-pepites-de-cette-rentree-_a764.html
et vous saurez tout!
Chronique des Fidélités sur le site "Partage Lecture"
Mon avis
Ce roman raconte le double destin de Guillaume Berkeley, le destin d’un homme à cheval entre deux cultures, deux mondes, deux pays, deux rives, deux aspirations, deux familles d’esprit, deux rêves de gloire et enfin deux amour (celui de Pauline, celui de son frère Victor). Guillaume a tout voulu en même temps, la lumière et l’obscurité, la gloire et l’héroïsme, le confort et le danger, sans doute a-t-il voulu changer les choses quelque part en lui, mais c’est lui-même qui aurait dû changer. Ceci ne dira sans doute rien aux futurs lecteurs sinon que nous sommes en pleine guerre de 1940-45, que dans ce livre on y parle de beaucoup de personnages, tout d’abord de Victor le frère, de Pauline l’amour de sa vie, Marco Dupin un ami homosexuel. D’autres connus comme de Gaulle, Hitler et sa clique, Cocteau, Jean Marais et bien d’autres que Guillaume côtoie dans sa folie. Que dire encore sans trop dévoiler ? Que l’on assiste au vol de toutes ces belles toiles que les Allemands, principalement Goering accompagné de Guillaume désigne les toiles qui lui plaisent. Je ne peux en dire plus, sinon que Guillaume sera jugé. Personnellement j’ai ressenti une grande pitié pour ce jeune homme qui malgré lui fut entrainé par le tourbillon de Paris pendant la guerre, j’aurais aimé lui crier de prendre un autre chemin mais ce garçon trop naïf et rêveur a tracé son chemin vers la gloire ou le malheur. La fin du roman m’a laissée perplexe et je ne sais quoi en penser. Chacun aura certes sa petite idée car c’est un livre passionnant porté sur une époque très connue et jamais je n’ai lu un tel roman qui m’a paru trop court malgré le nombre de pages. Un roman pas comme les autres, qu’il faut absolument lire. Vraiment un gros coup de cœur. 5/5
samedi 25 août 2012
jeudi 23 août 2012
Chronique de Christine Calmeau, sur le site de RTL.be
Par Christine Calmeau dans Coup de coeur, Romans , le 23 août 2012 16h42 |
Ils vivent tous les deux avec leur mère et leur beau-père sur une île anglo-normande.
Chaque année, pendant les vacances, ils attendent avec impatience l’arrivée de Simon Bloch, un riche intellectuel parisien, grâce à qui les deux adolescents ont enfin une ouverture sur le monde et le continent : leur mère n’a jamais autorisé qu’ils quittent l’île.
En
avril 39, alors que la menace gronde un peu partout en Europe,
l’arrivée de Pauline, la fille de leur beau-père va complètement
bouleverser leur quotidien, et les deux frères qui étaient
inséparables, vont, pour la première fois de leur existence, se
déchirer.
Tellement fort que Guillaume prend la fuite et va s’installer dans l’appartement de Simon Bloch à Paris.
Deux jours après son arrivée, l’Angleterre déclare la guerre à l’Allemagne. Plus rien ne sera jamais comme avant.
Les mois passent. Les Allemands s’installent et commencent à faire régner la terreur au sein de la population juive.
Simon Bloch
choisit de quitter la ville lumière, ne s’y sentant plus en sécurité.
Il propose d’emmener Guillaume avec lui, mais le jeune homme refuse et
reste vivre à Paris, où il s’accommode plutôt bien de la vie avec
l’occupant allemand … Dans un milieu où certains artistes, écrivains,
journalistes ou acteurs n’ont aucun scrupule à frayer avec les nazis…
Tout cela jusqu’au printemps 42, au moment où Guillaume ne sait plus trop bien qui il est.
Anglais ? Français ? Collabo ? Résistant ? Traître ? Héros ?
Difficile pour lui de savoir réellement quelle existence est la sienne dans cette période si noire de l’histoire.
Lui,
ce jeune homme qui a toujours fait preuve de sincérité envers toutes
celles et ceux qui ont croisé son chemin depuis qu’il a fui son île
natale.
Guillaume Berkeley, si jeune face à ces horreurs, face à toute cette folie humaine …
Nicolas
d’Estienne d’Orves réussit la performance de faire revivre ces années
de manière passionnante. Plus de 700 pages. Une brique, et jamais la
moindre lassitude. Au contraire. On adhère immédiatement à cette
histoire impossible à lâcher, un roman qui déconstruit sans jamais les
trahir, les lectures officielles de ces périodes les plus sombres du 20
ième siècle.
L’écriture est sensible, rapide, fluide. Elle cultive à merveille l’ambiguïté du personnage.
“Les fidélités successives”, un roman ambitieux, dont on parlera beaucoup. Et pourquoi pas une sélection pour le Goncourt ?
mardi 21 août 2012
Article de Pierre Vavasseur dans Le Parisien sur "Les Fidélités"
« Les Fidélités successives », de NICOLAS D’ESTIENNE D’ORVES
Porter le nom d’un martyr de la Résistance devait un jour ou l’autre inciter Nicolas d’Estienne d’Orves à jouer son va-tout littéraire. Son livre raconte la trajectoire d’un homme amené à fréquenter le milieu de la collaboration en travaillant au journal antisémite « Je suis partout ». Son livre est un flot. L’auteur joue sur tous les tableaux romanesques, décrit un Paris des heures sombres aux multiples visages, campe d’hallucinants portraits et maîtrise, jusqu’à la fin, son affaire et son suspense.
« Les Fidélités successives », de Nicolas d’Estienne d’Orves, Éd. Albin Michel, 716 pages, 23,90 €.
dimanche 19 août 2012
Et encore un fort aimable article sur le site "Le Salon littéraire".
« Les Fidélités successives » de Nicolas d’Estienne d’Orves : un roman époustouflant
Stéphanie
des Horts
jeudi 16 août 2012
vendredi 10 août 2012
Excellent papier sur "Les Fidélités Successives" sur le site Actua-Litté.com
Les fidélités successives, Nicolas d'Estienne d'Orves
Le pavé pourrait faire peur. Sept cent pages bien tassées,
bien noires, compactes et denses sur l'Occupation. Mais, sombre et
patiné, muni de tiroirs à quadruples fond et sculpté de motifs en
colimaçon, ce roman est aussi presque physiquement représentable,
imaginé comme une significative géométrie de cubes et de sphères, de
volutes tour à tour aplaties et distendues, d'espaces repliés, secrets
et cachés avant de s'ouvrir brusquement pour dévoiler des portes
nouvelles, des ouvertures surprenantes, et toujours infinies.
L'étonnement surgit à tout instant, au détour d'une page, d'un bout à l'autre de ce roman, éloquent, à l'écriture et à l'architecture d'une fluidité parfaite. Roman d'époque, peuplé d'hommes honnêtes jusqu'au désarroi et à la perdition, irrigué par une intense méditation sur l'intégrité– l'intégrité des hommes.
Tout se tient entre les deux premières images. La condamnation à mort du collaborateur (et héros de l'histoire) Guillaume Berkeley et celle qui suit, sur l'île de Malderney, refuge idéal, dans lequel Guillaume, accompagné de son frère Victor, promène à longueur de journée sa sensibilité, tel un voyant que l'on pourrait décrire, au sens poétique du terme selon Rimbaud : « arriver à l'inconnu par le dérèglement de tous les sens ».
C'est peut-être d'ailleurs de cette façon, que l'on peut passer du calme idyllique décrit au début de l'histoire à la noirceur brutale de la chute, affichée dès la première page. Porté par l'amour, puis la déception qui a suivi, Guillaume quitte l'île anglaise pour Paris, et devient, avec sa plume et ses croquis, une belle figure du Paris littéraire. Porté aussi par le plaisir et les mondanités, il devient critique culturel pour le journal collabo « Je suis partout ».
Ne sentant pas vraiment le danger, résistant malgré tout aux propos antisémites les plus violents, Guillaume s'engage, sans jamais trahir sans conscience, jusqu'à faire volte-face, et devenir résistant. C'est toute une histoire, celle d'une époque, traversant la seconde guerre mondiale, que raconte Nicolas d'Estienne d'Orves, avec cette malice qui le caractérise, cet art des personnages et des dialogues qui tiennent le lecteur aux aguets.
On se coule alors dans les phrases. On s'abandonne, quasi physiquement. Laboratoire littéraire, remarquable expérience de lecture, Les fidélités successives abolit la distance entre l'auteur et le lecteur, contraint d'entrer tout entier dans le nerf et le sang du texte. A la fois sinueux et précipité comme les chemins de l'inconscient, l'auteur créé un ondoyant suspense de l'intime, louvoie dans les impasses fantomatiques des êtres qui font corps avec leur environnement. Comment réussit-il à parler des faiblesses humaines avec autant de force, comment saisit-il les incertitudes avec autant de netteté ? En laissant certainement crier son amour de la littérature, par le c(h)œur des personnages, disséminés dans l'espace et le temps.
Nicolas d'Estienne d'Orves raconte les songes fragmentés de son héros, la dualité des actes qui se prolongent à l'infini dans son existence. Dans les voyages de Guillaume, on comprend qu'il agit parfois dans le souci des autres, par exigence de justice et de liberté, dans une perspective d'engagement et d'action, mais parfois aussi davantage pour lui-même, pour approfondir une quête intérieure.
Pour dire l'Occupation, l'auteur décrit mille détails tour à tour sordides et poétiques et révèle une ambiance étonnante.
Le jeune homme, Guillaume, raconte, et sent, à chaque seconde, la vérité plaquée sur sa langue comme un noyau de cerise. Le livre est irrésistible et par moments insoutenable. On détourne parfois le regard, comme au cinéma, les larmes coulent. Nicolas d'Estienne d'Orves densifie sa méditation sur l'histoire de la seconde guerre mondiale, empreinte tout à la fois d'espoir immense et de violence, en donnant à son roman la dimension d'une fresque aux accents douloureux assumés. Vaste trafic d'ambitions, de fidélités, de connivences entre collaborateurs, allemands, résistants, saleté poisseuse, et corruption des âmes : l'auteur travaille efficacement ce matériau impur pour nourrir un roman à suspense aussi documenté que spasmodique.
Et la fascination l'emporte. Voilà qu'on pénètre comme jamais dans la peau d'un homme ambivalent, à la fois résistant et collaborateur, mais terriblement fidèle. On assiste, médusé, à une histoire qui perd un peu de son sens. Il y a un réel talent dans cette œuvre où des descriptions précises donnent jusqu'à l'odeur, jusqu'au toucher, jusqu'à l'ouïe, l'ambiance crépusculaire de cette période confite en doutes et résignations, en amertumes et lâchetés, en détresses folles et rébellions audacieuses. Personne ne peut être innocent tant l'atmosphère change toute relation humaine où chacun survit comme il peut, où « le plus terrible dans ce monde c'est que chacun à ses raisons », comme l'énonce Octave, dans La règle du jeu de Renoir, film fétiche (on se doute) de l'auteur.
Nous sommes frappés par la cohérence et la complexité infinie du personnage dont les pensées conduisent la narration haletante. Nous restons longtemps saisis par les abîmes de l'ambivalence, d'humanité chancelante creusée derrière le récit de cette destinée. Alors, avec ce dix-septième ambitieux roman, on pourrait, désormais, être infiniment fidèle à ce grand écrivain.
L'étonnement surgit à tout instant, au détour d'une page, d'un bout à l'autre de ce roman, éloquent, à l'écriture et à l'architecture d'une fluidité parfaite. Roman d'époque, peuplé d'hommes honnêtes jusqu'au désarroi et à la perdition, irrigué par une intense méditation sur l'intégrité– l'intégrité des hommes.
Tout se tient entre les deux premières images. La condamnation à mort du collaborateur (et héros de l'histoire) Guillaume Berkeley et celle qui suit, sur l'île de Malderney, refuge idéal, dans lequel Guillaume, accompagné de son frère Victor, promène à longueur de journée sa sensibilité, tel un voyant que l'on pourrait décrire, au sens poétique du terme selon Rimbaud : « arriver à l'inconnu par le dérèglement de tous les sens ».
C'est peut-être d'ailleurs de cette façon, que l'on peut passer du calme idyllique décrit au début de l'histoire à la noirceur brutale de la chute, affichée dès la première page. Porté par l'amour, puis la déception qui a suivi, Guillaume quitte l'île anglaise pour Paris, et devient, avec sa plume et ses croquis, une belle figure du Paris littéraire. Porté aussi par le plaisir et les mondanités, il devient critique culturel pour le journal collabo « Je suis partout ».
Ne sentant pas vraiment le danger, résistant malgré tout aux propos antisémites les plus violents, Guillaume s'engage, sans jamais trahir sans conscience, jusqu'à faire volte-face, et devenir résistant. C'est toute une histoire, celle d'une époque, traversant la seconde guerre mondiale, que raconte Nicolas d'Estienne d'Orves, avec cette malice qui le caractérise, cet art des personnages et des dialogues qui tiennent le lecteur aux aguets.
On se coule alors dans les phrases. On s'abandonne, quasi physiquement. Laboratoire littéraire, remarquable expérience de lecture, Les fidélités successives abolit la distance entre l'auteur et le lecteur, contraint d'entrer tout entier dans le nerf et le sang du texte. A la fois sinueux et précipité comme les chemins de l'inconscient, l'auteur créé un ondoyant suspense de l'intime, louvoie dans les impasses fantomatiques des êtres qui font corps avec leur environnement. Comment réussit-il à parler des faiblesses humaines avec autant de force, comment saisit-il les incertitudes avec autant de netteté ? En laissant certainement crier son amour de la littérature, par le c(h)œur des personnages, disséminés dans l'espace et le temps.
Nicolas d'Estienne d'Orves raconte les songes fragmentés de son héros, la dualité des actes qui se prolongent à l'infini dans son existence. Dans les voyages de Guillaume, on comprend qu'il agit parfois dans le souci des autres, par exigence de justice et de liberté, dans une perspective d'engagement et d'action, mais parfois aussi davantage pour lui-même, pour approfondir une quête intérieure.
Pour dire l'Occupation, l'auteur décrit mille détails tour à tour sordides et poétiques et révèle une ambiance étonnante.
Le jeune homme, Guillaume, raconte, et sent, à chaque seconde, la vérité plaquée sur sa langue comme un noyau de cerise. Le livre est irrésistible et par moments insoutenable. On détourne parfois le regard, comme au cinéma, les larmes coulent. Nicolas d'Estienne d'Orves densifie sa méditation sur l'histoire de la seconde guerre mondiale, empreinte tout à la fois d'espoir immense et de violence, en donnant à son roman la dimension d'une fresque aux accents douloureux assumés. Vaste trafic d'ambitions, de fidélités, de connivences entre collaborateurs, allemands, résistants, saleté poisseuse, et corruption des âmes : l'auteur travaille efficacement ce matériau impur pour nourrir un roman à suspense aussi documenté que spasmodique.
Et la fascination l'emporte. Voilà qu'on pénètre comme jamais dans la peau d'un homme ambivalent, à la fois résistant et collaborateur, mais terriblement fidèle. On assiste, médusé, à une histoire qui perd un peu de son sens. Il y a un réel talent dans cette œuvre où des descriptions précises donnent jusqu'à l'odeur, jusqu'au toucher, jusqu'à l'ouïe, l'ambiance crépusculaire de cette période confite en doutes et résignations, en amertumes et lâchetés, en détresses folles et rébellions audacieuses. Personne ne peut être innocent tant l'atmosphère change toute relation humaine où chacun survit comme il peut, où « le plus terrible dans ce monde c'est que chacun à ses raisons », comme l'énonce Octave, dans La règle du jeu de Renoir, film fétiche (on se doute) de l'auteur.
Nous sommes frappés par la cohérence et la complexité infinie du personnage dont les pensées conduisent la narration haletante. Nous restons longtemps saisis par les abîmes de l'ambivalence, d'humanité chancelante creusée derrière le récit de cette destinée. Alors, avec ce dix-septième ambitieux roman, on pourrait, désormais, être infiniment fidèle à ce grand écrivain.
Par Virginie Troussier, le jeudi 09 août 2012 à 17:43:48 - 0 commentaire
Mots clés :
Les fidélités successives -
Nicolas d'Estienne d -
Albin Michel -
Roman
mardi 7 août 2012
Très chaleureux papier au sujet des " Fidélités Successives" sur le blog de La Librairie Générale d'Arcachon
Les fidélités successives de Nicolas d'ESTIENNE d'ORVES
Les fidélités successives de Nicolas d'ESTIENNE d'ORVES chez Albin Michel, (parution le 22 août 2012).
Ils sont jeunes et ils sont frères, ils
habitent l'île de Malderney et sont anglais. Ils n'ont jamais été sur le
continent, ne serait-ce qu'en France qui se tient pourtant à deux pas.
Chaque été, ils piaffent d'impatience de revoir l'homme qui leur apporte
des nouvelles de Paris. Hélas, les temps se durcissent, l'Allemagne
belliqueuse menace ses voisins puis, un jour, la Pologne est envahie.
A l'image des grands romans du XIXe siècle
de Dumas, Balzac, Stendhal, Sue... Nicolas d'Estienne d'Orves prend à
bras le corps les années de guerre et d'occupation parisienne. Notons
l'absolue réussite de l'atmosphère rendue avec une multitude de détails
qui authentifient la période. Le pari risqué d'embrasser tout ce qui a
fait vivre les parisiens durant les années 40 à 45 est remarquable voire
stupéfiant. D'innombrables "célébrités" jalonnent l'étonnant parcours
de l'aventurier narrateur (un des frères) avant que l'on ne revienne à
Malderney, pour conclure et rendre des comptes.
On pourrait bien sûr être lassé ou bien
s'amuser des incessants rebondissements de cette tumultueuse histoire,
le XIXe siècle nous poursuit mais chaque revirement, chaque coups de
théâtre forcent l'admiration et rendent l'inimaginable parfaitement
plausible. Il fallait tout cela pour approcher l'extrême complexité des
jeux et des enjeux que furent la collaboration, l'intelligence avec
l'ennemi et tout simplement la survivance chaque jour plus incertaine.
Nicolas Estienne d'Orves réussit l'impossible et frappe un grand coup sur la scène littéraire française.
vendredi 3 août 2012
J'explique le pourquoi du comment des Fidélités Successives (15 juin 2012)
cliquez sur :
http://www.youtube.com/watch?v=gclg0EovB1o
et la libraire Françoise Bascou (de La Librairie de l'horloge, à Carpentras) dit ce qu'elle en pense:
cliquez maintenant sur :
http://www.youtube.com/watch?v=RHZDYC8KxF8
merci tout le monde!
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