mercredi 7 novembre 2012
mercredi 24 octobre 2012
Critique des Fidélités dans L'Express (24 octobre 2012)
Nicolas d'Estienne d'Orves revisite l'Occupation
Par Baptiste Liger (L'Express), publié le
L'auteur réussit ici une fresque un peu chaotique mais richement documentée et feuilletonesque à souhait, où l'on croise Jean Marais, André Gide, Sacha Guitry, Darius Milhaud et l'écrivain collaborationniste Lucien Rebatet - dont Nicolas d'Estienne d'Orves, petit-neveu d'un célèbre résistant, n'est autre que l'ayant droit !
lundi 15 octobre 2012
samedi 13 octobre 2012
Compte-rendu des Fidélités successives sur le site "les livres que j'aime"
Les fidélités successives, Nicolas d'Estienne d'Orves, Albin Michel
Fresque ébouriffante
sur fond de Paris collabo. Guillaume est un gamin sensible,
intelligent, doué pour le dessin et promis à un avenir d'artiste. C'est
ce que pense son mentor, un parisien critique d'art qui passe toutes ses
vacances sur l'île anglo-normande où vit Guillaume avec son frère ainé
et ses parents, les châtelains ruinés du coin. Les frères grandissent
et s'adorent mais pour l'amour de Pauline ils deviendront un
jour rivaux. Ce jour-là, après une violente dispute, Guillaume s'enfuit
à Paris. Il a presque vingt ans, la guerre éclate et le laisse
désemparé mais pas à court de ressources. Il va naviguer dans ce Paris
interlope de l'Occupation comme un poisson dans l'eau jusqu'au jour où,
comme tant d'autres, il basculera du côté des vainqueurs pour sauver sa
peau. Roman historique et romanesque passionnant, ultra documenté,
fourmillant de détails savoureux sur les trafics de l'époque. Les
personnalités réelles se mêlent à la fiction et c'est génial. L'intrigue
m'a enchaînée aux pas incertains de Guillaume. Oui il est lâche, peu
scrupuleux, égoïste, oportuniste, futile et sans morale mais malgré tout
furieusement sympathique. Guillaume fait tout, le pire comme le
meilleur, avec une naïveté et une gentillesse déconcertantes. Trop jeune
et pas encore "construit" il se cherche une identité dans un monde sans
plus aucun repère. L'écriture brillante et habile donne un ton juste à
ce récit, sans dramatiser ni accuser. L'auteur nous parle de ce passage à
l'âge adulte pas si facile à négocier quand on est rêveur, exalté,
livré à soi-même et dépassé par les évènements. Guillaume n'est pas un
héros mais il est terriblement humain et c'est ça qui est bien.
J'ai adoré
: le rythme, le style, le ton, ce qui fait une super histoire que l'on a
plaisir à retrouver chaque soir avant de s'endormir. Il y a tout dans
ce roman, amour, haine, intrigues, anecdotes, humour, drames et larmes.
Les fidélités successives, Nicolas d'Estienne d'Orves, Albin Michel. 712 p 23,90€. En vente sur mon blog via Amazon.fr
Nicolas d'Estienne d'Orves, journaliste musical, a publié une vingtaine de romans dont Othon ou l'Aurore impossible Prix Roger Nimier 2002. Il a un talent de conteur étonnant.
Interview sur France Inter dans l'émission "Conduite accompagnée", en compagnie de GiedRe
Cliquez sur:
http://www.franceinter.fr/emission-conduite-accompagnee-mathias-deguelle-recoit-nicolas-d-estienne-d-orves-accompagne-de-giedr
vendredi 12 octobre 2012
Critique des Fidélités dans "Le soir" de Belgique (12 octobre 2012)
Infidélités, entre Modiano et Dumas
Le 13 mai 1946, Guillaume Berkeley
est condamné à mort pour collaboration.
Le public accueille le verdict
en injuriant le coupable. Une journaliste
conclut :
« L’île de Malderney est en
deuil, mais la France se porte déjà mieux :
un nouveau traître va payer pour ses crimes.
»
Malderney est une île anglo-normande
ajoutée aux cartes géographiques
par Nicolas d’Estienne d’Orves. Guillaume
Berkeley est un personnage tout aussi
imaginaire. Et que la France se porte
mieux est une appréciation personnelle
(de la journaliste, pas de l’auteur) dont
chacun fera ce qu’il voudra. De préférence
après avoir lu les sept cents et quelques pages
d’un roman touffu et passionnant.
L’argument rejoint celui que Patrick
Modiano a exploré dans certains romans
situés à la même époque : une ambiguïté
fondamentale cultivée en des temps troublés
après lesquels on vous demandera
dans quel camp vous vous trouviez – et, si
vous n’avez pas de réponse, on vous la
fournira. Nicolas d’Estienne d’Orves s’éloigne
de Modiano par la manière dont il
traite le sujet, plus proche d’un Alexandre
Dumas capable de tenir un lecteur en haleine
le temps nécessaire à aller jusqu’au
bout du roman sans relâchement de l’attention.
Au départ, il n’y a guère plus qu’une connerie
de jeunes adultes encore adolescents
dans leur approche de l’amour. Victor
et Guillaume, des frères élevés dans le
culte de la littérature française, se disputent
leur demi-soeur Pauline dont ils sont
amoureux, tandis qu’elle reste dans l’ambiguïté
(elle aussi). Guillaume part à Paris
au moment de la déclaration de guerre, le
1
er septembre 1939. Installé chez son mentor
qui séjournait chaque année sur l’île
de Malderney, Guillaume hésite bientôt
entre sa fidélité à celui-ci, qui est juif, et le
monde des plaisirs aussi intellectuels que
sensuels dans lequel sa jeunesse et sa vivacité
d’esprit font merveille. Il a dix-huit
ans, il est prêt à tout pour se frotter aux
esprits les plus brillants de son temps, et
tant pis s’ils l’entraînent dans une direction
que son absence de convictions ne
l’aurait pas fait choisir.
Il côtoie le « meilleur » de la collaboration
intellectuelle, dîne aux tables les plus
fines, fréquente les femmes les plus aguichantes…
Alexandre Dumas veille : on côtoie
des écrivains et des artistes de renom,
saisis dans des moments si peu reluisants
de leur biographie qu’on est parfois surpris
de les trouver là et, en outre, on a
droit à plus de rebondissements qu’on
n’osait en espérer.
PIERRE MAURY
mardi 9 octobre 2012
Compte-rendu des Fidélités sur le Blog "La librairie fantastique"
lundi 8 octobre 2012
Les fidélités successives, de Nicolas d'Estienne d'Orves
Je me suis embarquée dans la lecture d’un gros pavé intitulé Les fidélités successives, de Nicolas d’Estienne d’Orves, aux éditions Albin Michel. J’avais des à priori défavorables concernant cet auteur sans aucune raison valable, excepté qu’il écrivait avant des polars édités par Pocket. Qu’on s’entende, tous les polars édités par Pocket ne sont pas mauvais, loin de là, mais les couv’ n’était pas terribles, ni les résumés, et bon… voilà quoi, vous voyez je vous avais dit que c’était basé sur du vent.
M’enfin l’histoire des Fidélités successives, qui n’est pas
un polar, me faisait des clins d’œil langoureux, me balançant des Cocteau,
Picasso, Jean Marais et une histoire tragique de Seconde Guerre mondiale à la
figure. Et puis, sans aucune raison non plus autre que psychologique, je suis
irrémédiablement attirés par les gros pavés qui dans mon esprit sont toujours
gage de qualité.
Bon, ben sachez que ça n’a pas raté, j’étais plutôt contente
d’avoir pris la décision de le lire, parce que Les fidélités successive est un
très bon roman.
Pour vous raconter en quelques mots, Les fidélités
successives relate l’histoire de Guillaume Berckeley, artiste peintre,
journaliste, écrivain, jugé pour ses crimes pendant la seconde guerre mondiale,
sa collaboration avec l’Allemagne nazie, envoyé au bagne et suicidé
dans sa cellule en 1949.
Simon Bloch, vieil ami juif des Berckeley, celui qui a découvert
le talent de Guillaume dans son adolescence et lui a ouvert les portes de
Paris, revient à Malderney – l’île natale de son ami - pour lire à son frère
Victor et sa belle-sœur Pauline le manuscrit que le bagnard à laissé derrière
lui avant de se donner la mort.
Le reste du bouquin se présente donc sous forme de mémoires.
Loin de chercher à expliquer ses faits, à se justifier, à s’excuser, Guillaume
se contente de raconter les faits tels qu’il les a vécu, simplement, avec tous
les questionnements qui lui restent, et qui n’auront jamais de réponse.
Les fidélités successives ouvre alors deux intrigues, celle
de l’histoire du trio Victor /Pauline/Guillaume, qui a poussé Guillaume à
fuir Malderney, et celle de sa vie à Paris durant l’occupation allemande.
Ce qui m’a le plus intéressé dans ce roman c’est surtout le
côté historique du livre. On découvre la France et Paris avant la défaite, puis
pendant, et la vie que menait toute la clique des artistes français de l’époque.
Des fuites de mai 1940 à la résignation des parisiens occupés, jusqu’à la
collaboration passive de certains et la résistance cachées des autres… puis
enfin la libération, violente, rageuse, exterminatrice. Guillaume à tout vécu,
son parcours est atypique. Malderney étant une île (imaginaire) franco-normande
au même titre que Guernsey et Jernsey, il est anglais mais parle français dans
un pays en capitulation avec l’Allemagne et à présent en guerre contre les
anglais. Pour survivre, il se fait naturaliser, fraye avec ceux qui tirent le
mieux leur épingle du jeu, se met
sans vraiment le chercher dans les petits papiers de l’ambassade allemande et
se retrouve aux tables de Göring et de Céline. Photographié avec les plus
puissants occupants, il n’est pourtant pas un vrai collaborateur : il devient le
meilleur ami d’un juif homosexuel antisémite qu’il héberge dans le vieil
appartement de son ami en fuite Simon Bloch, trempe dans le marché noir pour
mettre du beurre dans les épinards, puis lorsque Pauline vient le retrouver et
lui demande de résister, il se lance dans le double jeu…
Allemands sous l'occupation, qui se prennent un p'tit kawa. |
Un cheminement en demi-teinte, puisqu’il est à la fois
collaborateur et résistant, entraîné malgré lui dans les combines les plus
louches et les faits les plus héroïques. La particularité du parcours du
Guillaume est surtout qu’il ne cherche qu’à vivre. Sa passion est l’art, alors
il devient chroniqueur d’art dans un journal collaborateur. Son statut d’anglais
le désigne comme le nouvel ennemi à abattre alors il se fait naturaliser en
échange de service pour l'empire allemand… et il
fait tout ça de façon candide, naïve, sans arrière-pensée, sans être mauvais.
Il n’a rien contre les juifs, n’a rien contre les français, n’a rien contre les
allemands, n’a rien contre les anglais, il veut juste vivre à paris, continuer
de côtoyer les plus grands, manger aux tables de Jean Cocteau, Sacha Guitry, Jean
Marais, et oublier les dégradations intellectuelles que les plus grands penseurs
infligent à leur temps pour ne retenir que la beauté de Paris et son histoire
culturelle.
L’histoire du trio amoureux que forment Guillaume, Pauline
et Victor sert et dessert le livre à la fois. Pauline est la demi-sœur par
alliance des deux frères. New-Yorkaise, mais aussi de Malderney, elle les rejoint
à ses dix-huit ans, et se met à jouer avec les sentiments des deux frères. D’inséparables
ils vont vite devenir rivaux et une haine profonde va s’installer. C’est cette
rivalité qui va précipiter le départ de Guillaume pour Paris, pour oublier
Victor et Pauline. Bon bien-sûr l’histoire ne s’arrête pas là, c’est un poil
les feux de l’amour parfois dans tout ça… ! Mais cette romance permet de
donner un fil rouge à l’histoire, car finalement ce qui relie les trois
personnages est aussi ce qui va pousser Guillaume à sa perte.
Alors voilà, on est
plongé dans une ambiance parisienne des
plus étranges. Chaque table de restaurant, chaque banquette de cabaret
regorge
de collaborateurs ou d’allemands. L’aventure de Guillaume nous emmène
des les
festins et les soirées les plus pimpantes du Paris occupé, alors que le
reste de la population souffre et ne sait pas sur quel pied danser ; des
familles
de juifs se font rafler et la population se barricade derrière ses
volets
avec ses maigres tickets de rationnement, les rues sont désertes, le
couvre-feu
donne des sueurs à tous les promeneurs nocturnes, et les escouades
d’allemands
s’imposent dans chaque établissement en territoire conquis avec une
vulgarité et
un mépris de plus en plus flagrants. Guillaume lui se laisse porter,
nous
emporte avec lui, et on lit son récit emplis d'émerveillement et de
dégoût.
Arrestation de Sacha Guitry en 1944, comme de nombreux artistes après la libération |
C’est le second livre que je lis sur cette période de l’histoire.
Le premier était Alibi Club, un polar historique qui se passe durant les deux
mois précédents l’arrivée des allemands à Paris, puis les quelques semaines
après leur intrusion. Son intrigue policière permettait de rencontrer tout un
tas de personnages aussi sombres et ambigus que ceux des Fidélités successives,
et des faits qui se sont passés dans l’ombre de l’histoire dont on n’avait
jamais entendu parler.
Ah, il est loin le
temps où l’on nous apprenait seulement la grande Résistance française,
passant la collaboration et la noirceur de l'occupation sous silence.
Aujourd’hui, les enfants commencent enfin à apprendre le
rôle de la France dans cette guerre, qui n’a pas été faite que de
résistance.
Tout n’était pas blanc, tout n’était pas noir, Les fidélités successives nous
fait voir l’histoire autrement, dans ce qu’elle a de plus beau et de plus
pourri.
Bref, je vous laisse aller jeter un coup d’œil à ce roman en
librairie, il a accompagné mes esprits pendant quelques jours après l’avoir lu,
comme si j’avais regardé le soleil un peu trop longtemps et que je n’arrivais pas
à me défaire de son empreinte, un gage de qualité selon moi.
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